Nom de code: Aker.
Ce programme agronomique français consacré à la betterave sucrière, vient tout juste de s’achever après huit années de recherche. Objectif : accélérer la sélection de variétés pour s’adapter à de nouvelles contraintes. La stratégie des scientifiques est fondée sur l’exploitation de la diversité génétique de la plante afin de faire face à des situations très diverses : stress hydrique, maladies, mais aussi changements de réglementation sur l’utilisation de produits phytosanitaires etc…
L’enjeu est de taille comme le rappelle l’actualité sur les néonicotinoïdes, ces insecticides accusés de tuer les pollinisateurs et en particulier, les abeilles. Avant leur interdiction le 1er septembre 2018, les producteurs de betteraves sucrières les utilisaient sous forme d’enrobage de semences pour lutter contre le puceron, vecteur de virus responsables de jaunisses des feuilles. Ces maladies sont redoutées par la filière car elles conduisent à des pertes de rendement pouvant atteindre les 50%. Les betteraviers ont d’ailleurs été si durement touchés en 2020, qu’ils ont pu bénéficier d’une dérogation autorisant ces produits jusqu’en 2023. Mais après ? Sans alternative, c’est toute la filière qui risque de s’écrouler.
Si Aker n’a à ce jour pas de solution contre la jaunisse, il représente un espoir de mettre au point dans les prochaines années, une variété résistante à la maladie. Et ce grâce à son approche prédictive qui permet de réduire sensiblement les temps de développement. Plutôt que de tester au champ et a posteriori les performances de nouveaux hybrides – un processus long et laborieux – les chercheurs ont mis au point de nombreux outils pour la prédiction de ces performances. Ces outils reposent avant tout sur l’observation détaillée à tous les stades de la croissance de 3200 hybrides retenus pendant le programme pour leurs qualités génétiques. Ce travail dit de phénotypage, consiste à mesurer l’ensemble des caractères observables de la plante : sa vitesse de développement, sa résistance aux maladies, son rendement final en sucre etc… Ainsi, à partir de quelques indicateurs comme la surface totale des feuilles et leur teneur en chlorophylle, il devient possible de prédire avec une assez grande précision le rendement final en sucre.
A l’aide de technologies d’imagerie avancées, les chercheurs ont aussi pu suivre et évaluer en laboratoire le comportement des hybrides sous certaines contraintes, comme par exemple la germination des graines en fonction de la température
Ils ont ainsi identifié les semences qui résistaient le mieux au froid. Au champ et toujours grâce à l’imagerie, embarquée cette fois sur un drone et sur une plateforme robotisée, les équipes d’Aker ont évalué rapidement la résistance des hybrides à la cercosporiose, maladie provoquée par un champignon et affectant les feuilles. L’idée est ici de réduire l’utilisation de fongicides grâce à la sélection de nouvelles variétés résistantes à ces agents pathogènes. Aker est donc une véritable rupture technologique dédiée à la betterave sucrière, promettant une adaptation rapide aux changements tant environnementaux que réglementaires.